L’un des plus grands hommes du théâtre algérien, Abdelkader Alloula est né le 8 Juillet 1939 à Ghazaouet. Après avoir fait sa scolarité à Aïn El-Berd (ex-Oued Imbert, prés de Sidi Bel-Abbès, il s’installa à Oran avec sa famille. C’est dans cette ville qu’il se passionna pour les planches, en abandonnant ses études secondaires. C’était en 1956, aux côtés de jeunes oranais qu’il intégra la troupe théâtrale « Echabab » et participa à des stages de formation au « Petit Théâtre » de la rue chanzy , du plateau St_Michel (Haï Sidi Bachir). Il Joua dans des pièces de Mohamed Krachaï et de Mohamed Touati.
Au lendemain de l’indépendance, feu Abdelkader Alloula réalisa dans le cadre de l’Ensemble Théâtral Oranais (E.T.O) « El-Asra » ou « Les captifs » de Plane. Il fut, par a suite recruté en qualité de comédien par le Théâtre national algérien (T.N.A). A cette périodes, il fut distribué dans d’importantes œuvres du répertoire universel : « Don Juan » de Molière, « La vie est un songe » de Calderon, « Roses rouges pour moi » de Sean O’Casey, « La mégère apprivoisée » de Shakespeare et « Chœurs » de Tom Brulin . Parmi les textes d’auteurs algériens qu’il eut à interpréter dans la période ²²1963-1965 sont cités : « Les enfants de la Casbah », « Hassan Terro » et le « Serment ». Entre temps, en 1964, il signa sa première mise en scène au sein du Théâtre professionnel avec la célèbre pièce « El-Ghoula » et entama une brillante et riche carrière de metteur en scène au cours de laquelle il produira plus de quinze pièces.
Auteur prolifique, il se met à créer ses propres textes, où il met en scène des situations burlesques et des tableaux reflétant la réalité sociale dont les thèmes sont puisés dans les quartiers populaires de la ville d’Oran, auprès des petites gens, dans les cafés maures et les marchés populaires. En 1969, son talent – empreint du jeu de scène de la « Halqa » qu’il garda de ses vieux souvenirs du « Meddah » (conteur) qui se produisaient sur la vaste esplanade, surnommée par les Oranais « Tahtaha », dans le quartier mythique de Medina Djedida – explose avec l’émergence de sa première création « Lâalague » (Les Sangsues), suivie un an après par « El-Khobza », puis de « » Homk Salim » (1972), adapté du Journal d’un fou » de Gogol, « Hammam Rabi » (1975). Il a écrit avec Ben Mohamed, la pièce « Hout Yakout Hout » (le gros poisson mange le petit) au cours de cette même année. Mais c’est à partir des années 1980 que Alloula pénétrera dans le monde du Théâtre expérimental de la « Halqa », en faisant une synthèse du patrimoine culturel de l’oralité et les acquis du théâtre moderne. Il produira sa triptyque célèbre, des pièces phares qui sont : Le goual » (Les dires) en 1980, » El-Ajouad » (Les généreux) en 1985 et « El-Lithem » ( Le voile) en 1989. En fait, l’importance du théâtre de feu Abdelkader Alloula procède du caractère systématique de sa recherche de formes d’expression issues du terroir et en même temps ouverte sur l’universel. La richesse de la langue, l’intégration habile du « Goual » , le sens du rythme et le désir de communiquer, l’émotion esthétique au plus large publique, font de l’œuvre de Alloula un moment majeur de l’histoire du théâtre algérien. Auteur, comédien et metteur en scène d’art dramatique, « Si Abdeka » comme aimaient à l’appeler les pauvres gens, est également l’auteur de deux scénarios réalisés pour le compte de la RTA par Mohamed Ifticène. Avec Berichi Bachir, il adapte cinq nouvelles pour l’ENTV. Il a été aussi acteur de cinéma dans plusieurs films, entre 1969 et 1990 et participa aux commentaires du documentaire à succès : « Combien je vous aime » de Azzedine Meddour. Il se consacra aussi inlassablement à des œuvres caritatives et sanitaires. Oran qui a été, et qui reste, toujours le berceau d’Abdelkader Alloula, lui a consacré à titre posthume, et en hommage à son œuvre grandiose « La première biennale théâtrale d’Oran » en Mars 1996.
Le 10 mars 1994 au soir, «Le Lion d’ Oran » est victime d’un lâche attentat terroriste devant la porte de son domicile familial. Alloula est mort, mais son œuvre survivra contre l’oubli. Sa mort a suscité de nombreuses manifestations populaires à Oran et dans d’autres villes d’Algérie, En souvenir de sa mémoire, le Théâtre Régional d’Oran est baptisé Abdelkader Alloula, un nom qui symbolisera cette célèbre personnalité dont la générosité est égale à son talent.